introduction

Considéré comme expérimental et radical, le célèbre groupe underground Fifth Column a joué un rôle essentiel dans l'univers musical punk et post-punk de Toronto. Actif de 1981 à 2002, Fifth Column a bousculé le paysage culturel de la ville.

Grande influence du mouvement Riot Grrrl des années 1990, qui combinait féminisme, politique et punk, Fifth Column a utilisé sa musique et ses voix comme plateforme de résistance pour repousser la société et son néo-conservatisme.

Toutes les femmes...
Une photo noir et blanc de trois femmes assises contre un mur. La femme à gauche a la tête baissée et joue avec un ruban dans ses cheveux. La femme au milieu porte des lunettes de soleil et fixe la caméra. La femme à droite a les bras croisés et posés sur ses genoux.

Les membres de Fifth Column G.B. Jones, Caroline Azar et Beverly Breckenridge.

Photo de Jena Von Brucker

Toutes les femmes...

À ses débuts, G.B. Jones faisait partie d’un groupe électronique expérimental nommé Bunny and the Lakers, dans la foulée du mouvement punk à Toronto. Après que G.B. Jones s’est jointe à un nouveau groupe appelé Second Unit avec Janet Martin et Kathleen Robertson, Caroline Azar a auditionné pour devenir leur nouvelle membre. Les quatre femmes ont ensuite renommé leur groupe  « Fifth Column ».

Band Texte

Les membres fondatrices de Fifth Column étaient G.B. Jones au chant, à la batterie et à la guitare, Caroline Azar au chant et à l’orgue, Kathleen Robertson à la basse et à l’accompagnement vocal, et Janet Martin à la guitare et à l’accompagnement vocal.

Le nom Fifth Column provient d’un terme militaire qui désigne un groupe de personnes qui sapent un groupe plus important de l’intérieur – une signification dont le groupe était bien conscient. Fifth Column échappait aux étiquettes. Jugée trop radicale, trop féministe, trop expérimentale ou trop queer, sa musique s’inscrivait dans les marges.

La culture zine

La culture zine

Les zines sont souvent des publications artisanales à petit tirage. Ils ont gagné en popularité dans les années 1970 et 1980, en particulier dans les mondes punk et post-punk. Le zine HIDE de G.B. Jones et Caroline Azar a été le premier à combiner des œuvres d’art bricolées, faites à la main et autopubliées avec des cassettes. Les zines regorgeaient d’informations sur les groupes, leur musique et leur sous-culture. Ils permettaient aux artistes de soutenir d’autres groupes et d’échanger de la correspondance. À l’époque, cette information n’était pas relayée par les médias grand public.

Caroline Azar, Kathleen Robertson et leur amie Candy Parker ont lancé le zine HIDE pour prendre la parole dans le monde culturel. Elles se sont attaquées à la culture gaie normative, adoptant une approche féministe. G.B. Jones a rejoint le groupe pour la deuxième édition de HIDE.

Page couverture noir et blanc d’un zine mettant en scène un homme debout sur un toit et le mot « Hide » écrit à la verticale à côté de lui.

Couverture du zine HIDE 4, créé par Caroline Azar et G.B. Jones; concept, design et lettrage par G.B. Jones. Le zine HIDE comprenait des cassettes mettant en vedette d’autres groupes punk rencontrés lors de tournées en Ontario.

Concept, design et lettrage par G.B. Jones. Avec l’aimable autorisation d’ Alternative Toronto

Zine2

Face à la montée de la musique hardcore et homocore, deux styles dominés par les hommes, G.B. Jones a inventé le terme « queercore » dans son appartement du centre-ville de Toronto et a lancé le zine JD’s avec Bruce LaBruce.

L’inclusion était au centre de sa vision sociale et politique. Le queercore s’est inspiré de l’esprit d’autonomie de la culture zine, se servant de l’art et de la musique pour lutter contre les préjugés de la société et la discrimination à l’encontre des communautés LGBTQ2+.

Un collage d’images en noir et blanc comprenant une série d’affiches et de dépliants pour Fifth Column et d’autres groupes. La photo de deux femmes se trouve au centre. La femme à droite est debout, légèrement penchée vers l’arrière. La femme à gauche est penchée et s’accroche au dos de la veste d’une autre femme, qui semble s’enfuir.

Candy Parker a créé le zine Dr. Smith, qui raconte l’histoire d’un agent secret fictif s’infiltrant dans le monde du punk pour repérer les esprits subversifs. Cette édition de 1984 comprend un collage d’images photocopiées, de photos, de dépliants et d’affiches de Fifth Column.

Dr. Smith, numéro 2, page 28, avec l’aimable autorisation de The ArQuives

To Sir With Hate

To Sir With Hate

Fifth Column a sorti son premier album complet, To Sir With Hate, en 1986. Cet album affichait sa position sans complexe : on pouvait y lire la devise « Plus d’excuses œdipiennes » griffonnée sur un côté de la pochette. Pour promouvoir ce nouvel album, les membres du groupe ont accordé des interviews aux journaux, mais elles ont demandé à être citées sans leur nom de famille, afin d’éviter de donner à leurs pères un crédit non mérité.

Imprégnées de politique locale, les chansons de l’album traitaient d’événements réels et d’injustices. La chanson The Fairview Mall Story parle d’une cruelle opération de surveillance dans les toilettes d’un centre commercial de St. Catharine’s qui a exposé au grand jour l’orientation sexuelle de certains hommes gais. À partir de cet horrible événement, Fifth Column a créé une chanson d’amour empathique et libératrice pour les personnes qui s’interrogent sur leur orientation sexuelle.

À nos yeux, les chansons de To Sir With Hate sont des chansons protestataires d’adolescents.  

C’est indéniable, nous sommes plutôt jeunes, mais cet album représente exactement où nous en étions quand nous l’avons enregistré. C’est une réponse immédiate

— Caroline Azar, entretien avec le Globe and Mail, 8 septembre 1986
Les films en Super 8

Les films en Super 8

De nombreux spectacles de Fifth Column ont été accompagnés de projections de films en Super 8. En effet, G.B. Jones et Caroline Azar ont collaboré avec le cinéaste expérimental John Porter pour réaliser une série en noir et blanc, que Caroline a baptisée « Moving Wallpaper » (tapisserie roulante). Lors des spectacles, Porter projetait en boucle des films en Super 8 vers la scène, sur les membres du groupe habillés en blanc.

Deux femmes jouent de la musique sur scène devant une toile de fond peinte. La femme de gauche chante dans un micro et est assise devant un clavier. La femme de droite joue de la guitare.

Caroline Azar et Anita Smith, membres de Fifth Column, se produisent sur scène.

Photo de Mark Leach

Like This

Regarde : Like This

En plus de ses spectacles, Fifth Column a utilisé la projection de films en Super 8 dans ses vidéoclips. Le vidéoclip ci-dessous, tiré de l’album All-Time Queen of the World (1990), a été co-réalisé par Bruce LaBruce, photographe, auteur et réalisateur avec lequel le groupe a travaillé pendant des années.

?

Cette exposition en ligne utilise des applications tierces, notamment Spotify et YouTube. Vérifiez auprès de l'administrateur Web de votre organisation si vous ne parvenez pas à accéder au contenu de ces chaînes dans l'exposition.

Regarde le vidéoclip de la chanson « Like This », paru en 1990. Ce simple est tiré de l’album « All-Time Queen of the World », co-réalisé par le Canadien Bruce LaBruce et les membres du groupe Fifth Column. Remarque : Cette vidéo de tiers n’est pas sous-titrée.

Voir la transcription

[Musique d’intro] 

[Intro Music]

♪Like This

It begins again

Like This

It begins again

Like This

Start at the end again

It's where the clocks are all wrong

It's where you stayed away too long

It's where the clocks are all wrong

It's where you stayed away too long

It's where the Bride tells the Groom,

"You ruined my wedding",

And the Landlord is dead.

Like This

It begins again

Like This

It can never end

Like This

It begins again

Like This

It can never end♪

[Musique]

Paroles de GB Jones

She Said Boom

She Said Boom

Bien des Torontois connaissent le disquaire She Said Boom. Situé dans l’ouest de la ville, ce magasin tire son nom des paroles de la chanson She Said, ’Boom’ de l’album de Fifth Column All-Time Queen of the World, sorti en 1990. 

En gros, « She said boom » sont trois mots simples qui, pour nous, signifient être responsable de sa propre révolution, et pouvoir exprimer tout haut son exaspération face à la fausseté : « Je dis boum, tu dis boum, elle dit boum! »

— Caroline Azar, The Media Co-op, 2013

La chanson parle d’un jeune garçon qui est perplexe face à l’indépendance de sa copine : « Ma petite amie bombarde des monuments et je ne sais pas quoi faire!! » 

Le verbe « bombarder » signifie taguer un o bjet ou un bâtiment avec de la peinture en aérosol, une pratique courante dans le monde des graffitis. G.B. Jones était une graffiteuse active durant ses années avec Fifth Column.    

Une photo couleur d'un mur de briques avec les mots «Cinquième chroniqueurs échappent à la tragédie» écrits dessus à la peinture en aérosol.
G.B. Jones, membre de Fifth Column, a produit de l’art public, dont des graffitis, dans tout Toronto pour promouvoir des thèmes chers au groupe, comme le féminisme et l’indépendance.
Art et photo par G.B. Jones
Fifth Column fleshes out

Fifth Column combine une attitude punk avec une palette musicale diversifiée... des chansons pop qui rappellent les girl groups des années 1960 comme les Shangri-Las sont entrecoupées d’harmonies rêveuses et décalées qui évoquent le travail de Tracey Thorn avec les Marine Girls, avant Everything but the Girl.

— Chris Dickinson, « Punk filtered through queer », Chicago Reader, 7 janvier 1993
Donna

Regarde : Donna

Tirée de l’album 36C de Fifth Column, la chanson « Donna » est nommée en l’honneur de la rockeuse punk américaine Donna Dresch, fondatrice et guitariste du groupe punk Team Dresch, qui a fait une apparition dans le film The Yo-Yo Gang de G.B. Jones en 1992. Dresch était également une membre occasionnelle de Fifth Column, participant à deux de leurs tournées et enregistrant plusieurs morceaux de 36C, sorti en 1994.

?

Cette exposition en ligne utilise des applications tierces, notamment Spotify et YouTube. Vérifiez auprès de l'administrateur Web de votre organisation si vous ne parvenez pas à accéder au contenu de ces chaînes dans l'exposition.

Regarde le vidéoclip de la chanson « Donna » de Fifth Column, paru en 1994. La vidéo présente plusieurs photos de la rockeuse punk Donna Dresch. Réalisé par Friday Myers, écrit par Caroline Azar. Remarque : Cette vidéo de tiers n’est pas sous-titrée.

Voir la transcription

[Musique d’intro]

♪Lately life's been a blast

Everybody's burnin' flags
There's a talk show called
Man To Man
My brother's stealin' software again
Sure wish you'd move to town
Donna
Donna
I must get her to visit the north
Donna's a girl who's full of worth
She can do everything at once
And write postcards
So much fun
The crowd will fall in love with you
Donna
Donna
She has played in so many bands
Jumps up and down
Slaps her hands on the bass guitar
But she live very far very far
Move to town
Donna
Donna♪

[musique]

Paroles de Caroline Azar

Une influence du mouvement riot grrrl

Une influence du mouvement riot grrrl

Le mélange unique de féminisme, de punk et de politique de Fifth Column a voyagé bien au-delà de Toronto pour influencer le mouvement punk underground riot grrrl.

Le féminisme et le militantisme politique de l’oeuvre de Fifth Column ont influencé de nombreux groupes, dont Bikini Kill, Bratmobile et Sleater-Kinney. Les groupes du mouvement riot grrrl ont également adopté les zines et l’esthétique bricolée mise de l’avant par Fifth Column.

[Fifth Column] était un groupe de femmes légendaires. Nous avions vu les films, lu les zines, totalement obsédés. Elles sont venues en ville. Elles étaient absolument charmantes.

Je me souviens juste m’être demandé « Pourquoi est-ce que c’est nous qui avons toute l’attention? Elles sont tellement meilleures que nous. »

 — Kathleen Hanna, chanteuse de Bikini Kill, 2012
Les zines riot grrrl
 Une couverture de zine noir et blanc avec les mots « riot grrrl » écrits en lettres attachées. Daté de juillet 1991,

Riot Grrrl no 1, Molly Neuman et Allison Wolfe, juillet 1991, avec l’aimable autorisation de Fales Library NYU / Feminist Press

 Un dépliant à l’encre noire sur fond rouge, en caractères alternés gras et non gras.

Dépliant conçu par Kathleen Hanna de Bikini Kill, avec l’aimable autorisation de Fales Library NYU / Feminist Press

Fifth Column Film

Regarde : un film sur Fifth Column

En 2012, le documentaire She Said Boom: The Story of Fifth Column, de Kevin Hegge, est présenté pour la première fois au Festival international canadien du documentaire Hot Docs. Cette œuvre primée aborde l’influence considérable de Fifth Column dans la musique et la sous-culture queer au cours des années 1980 et 1990.

?

Cette exposition en ligne utilise des applications tierces, notamment Spotify et YouTube. Vérifiez auprès de l'administrateur Web de votre organisation si vous ne parvenez pas à accéder au contenu de ces chaînes dans l'exposition.

Regarde la bande-annone de She Said Boom: The Story of Fifth Column, de Kevin Hegge. C’est un documentaire qui souligne l’influence profonde de Fifth Column sur la culture et la musique punk. Remarque : Cette vidéo de tiers n’est pas sous-titrée.

Voir la transcription

Il n’y aurait pas eu de mouvement riot grrrl sans Fifth Column.

Sabotage, subversion et lutte pour le pouvoir. Tous les mots pour me décrire qui te semblent être de mauvais mots sont en fait de bons mots. Il y avait beaucoup d’animosité à leur égard. Il y avait beaucoup d’hostilité à leur égard. Et elle a appelé cela le son de la musique qui s’effondre. 

Le monde du punk était vraiment hétéro et le monde gai était vraiment nul. Les filles de Toronto avaient une vision plus large. Mais quand il y a des personnalités explosives et créatives, c’est sûr qu’il y a des conflits. 

Puis, il y a eu une énorme bagarre. Certains jeunes punks se sont vraiment énervés parce qu’il y avait du contenu queer dans les films. Le monde réel est plutôt nul, mais  le monde que nous avons créé n’était pas nul. Je ne crois pas qu’il resterait beaucoup de structures si les choses allaient à notre manière.

Fifth Column aujourd’hui

Fifth Column aujourd’hui

De nos jours, G.B. Jones est notamment connue pour ses films expérimentaux en Super 8 et pour le zine queerpunk JD’s. C’est une dessinatrice prolifique qui a créé Tom Girls, une série de croquis libérés et subversifs. Le travail de G.B. Jones continue d’être reconnu. Elle joue actuellement dans Opera Arcana avec Minus Smile.

Caroline Azar est aujourd’hui réalisatrice et dramaturge indépendante adepte de la comédie de guérilla. En 2018-2019, elle a mis sur pied une série de performances sous forme de visites à pied interactives : St. Peon of The People et St. Peon of Parkdale

Explore à fond

Explore à fond

She Said Boom : The Story of Fifth Column. Réalisé par Kevin Hegge. 2012.  

Jonny Dovercourt. Any Night of the Week, A D.I.Y History of Toronto Music. 1957-2001. Toronto : Coach House Books. 2020.